Voilà une originalité tout droit venue d’Asie. Très peu planté dans nos jardins, le Buisson à papier renferme un grand lot de surprises au jardinier qui se laissera tenter par cette curiosité.
1. DESCRIPTION
Originaire de Chine centrale et de l’Himalaya, le Buisson à papier y pousse naturellement en forêt, sur les collines de faible altitude et sur les rebords des rivières. Il répond sous le nom scientifique d’Edgeworthia et tire son nom vernaculaire de son usage dans la fabrication de papier de luxe, la calligraphie ou les billets de banque. Cet usage était très démocratisé par les asiatiques du 17e au 19e siècle. Il appartient à la famille des Thyméléacées tout comme le Daphné, dont il est très proche.
1.1. Caractéristiques
Le Buisson à papier est un arbuste de taille moyenne, ne dépassant guère les 1,20 à 1,50 m en tous sens. Il pousse de manière buissonnante sur une touffe formée par de nombreuses tiges au bois souple. La première particularité de cette plante vient de la façon dont elle grandit. Chaque extrémité de tige fleurit puis se divise en 3 nouvelles branches qui viennent couronner le bourgeon apical. Cette étonnante croissance le rend alors quasi symétrique, s’élargissant à mesure qu’il ne s’érige.
Son feuillage est quant à lui assez simple, de grandes feuilles vertes d’une douzaine de centimètres de long, tendres et légèrement duveteuses. Elles apparaissent après la floraison.
Cette dernière est justement la caractéristique la plus originale de l’Edgeworthia. Les inflorescences se forment sur le buisson à partir de novembre sous la forme de petites boules de boutons floraux compacts, portées par un pédoncule recourbé vers le sol. Ces boutons couronnent les extrémités des tiges. L’évolution intervient à partir de la mi-janvier, les inflorescences se redressent alors à mesure que chaque fleur du pourtour du bouquet s’ouvre. Les ombelles prennent la forme de belles boules composées de plus de 30 calices jaune citron à base blanche qui perdurent ainsi jusqu’à début avril. Au-delà de leur originalité incontestable, elles ont le précieux avantage d’être en plus parfumées, dégageant des effluves de Chèvrefeuilles et de Jasmin. L’Edgeworthia fait partie des premiers arbustes en fleurs du jardin, ce qui ravit les premiers insectes pollinisateurs, car leurs fleurs produisent en plus beaucoup de nectar.
Une fois la floraison achevée, des fruits peuvent se former si la plante a été pollinisée. Ces derniers prennent l’apparence de drupes similaires à un noyau sans pulpe. Ils ne sont bien sûr que décoratifs et non comestibles.
Un autre point fort du Buisson à papier est sa longévité pouvant atteindre 60 à 80 ans, une plantation pour du très long terme, ce qui est étonnant de premier abord pour un arbuste de ce genre. Il pousse relativement vite les premières années de sa vie puis ralentit au fur et à mesure. Sa résistance au froid est de l’ordre de -12°.
1.2. Ses utilisations en Asie
Le papier
De nos jours, la fabrication de papier grâce à l’Edgeworthia représente environ 360 tonnes par an. Celui-ci est toujours utilisé pour de petites demandes dans la confection de papier de luxe. Il faut compter 100 kilos d’écorce pour produire 3 à 5 kg de papier. Les branches récoltées n’étant pas grosses, l’industrialisation de cette technique est donc très compliquée. Ne sont récoltées que les branches de moins de 10 ans, car ensuite, l’écorce perd de sa souplesse et de sa qualité.
La méthode traditionnelle consiste à couper les branches en début d’hiver après la chute des feuilles. L’écorce y est ensuite enlevée après avoir subi un bain chaud dans une étuve. Celle-ci est ensuite placée dans un mélange composé d’eau, de cendre, de soude caustique et de chaux pour l’assouplir. Elle est ensuite lavée abondamment à l’eau claire durant plusieurs jours avant d’être battue manuellement pour en libérer les fibres et terminer le processus de production des feuilles.
À savoir : l’écorce de l’Edgeworthia contient un insectifuge naturel, favorisant alors la durée de vie du papier produit.
Les cordes
Quand l’écorce est utilisée pour le papier, les tiges ne sont pas détruites pour autant. Leur souplesse et teneur en fibres font qu’elles sont tressées pour produire des cordes souvent utilisées dans l’art floral Japonais.
Les bienfaits en médecine traditionnelle
Les Chinois utilisent également les racines de l’Edgeworthia pour traiter les problèmes oculaires et pour ses vertus anti-inflammatoires.
1.3. Les différentes variétés
Le genre des Edgeworthia compte 4 espèces différentes, toutes d’origine asiatique. Seule l’espèce chrysantha est multipliée à des fins ornementales. Elle se décline toutefois en plusieurs cultivars, ayant été sélectionnés surtout pour leurs fleurs.
Edgeworthia chrysantha : Espèce type décrite ci-dessus
Edgeworthia chrysantha ‘grandiflora’ : Variante a inflorescence plus grandes que l’espèce type
Edgeworthia chrysantha ‘red dragon’ : Cultivar à fleurs orange vif, virant au fur et à mesure de leur maturité au rouge.
2. LA PLANTATION
2.1. Où ?
La plantation du Buisson à papier doit être finement réfléchie avant de se faire. En effet, sa grande durée de vie fait qu’il faut l’installer à un endroit où il pourra y prospérer dans de bonnes conditions durant de longues années.
Il apprécie tout particulièrement les ambiances chaudes et humides, favorables à sa croissance. Il s’adapte à bon nombre de sols à partir du moment où ils sont frais, mais drainés. Question pH, il a une préférence pour l’acidité bien qu’il puisse tolérer un peu de calcaire sans excès toutefois.
Question exposition, choisissez un emplacement mi-ombragé à ensoleillé, protégé des vents froids. La proximité d’un mur orienté ouest, d’un abri de jardin, d’une haie ou au sein d’un massif composé d’arbres sont quelques exemples d’emplacements de choix.
2.2. Quand ?
Le Buisson à papier redoute les gelées tardives qui peuvent brûler les jeunes feuilles juste après leur débourrement. C’est pour cette raison qu’il est préférable de le planter après sa floraison, c’est-à-dire durant les mois de mai et juin ou bien carrément en début d’automne. Ce second choix permet à l’arbuste de s’enraciner avant l’hiver, pour pouvoir fleurir et croître avec plus d’entrain dès le printemps suivant.
2.3. Comment ?
Lorsque l’emplacement est choisi, vient le moment de la plantation. Avant toute chose, si le sol n’est pas adapté à ses besoins, des amendements peuvent être nécessaires :
– l’apport de sable graveleux et de terreau composté pour alléger un sol trop lourd et dur.
– l’apport de terre de bruyère en sol trop calcaire pour contrebalancer le pH.
– L’apport de fertilisant organique complet pour enrichir un sol trop pauvre.
La plantation peut ensuite débuter en commençant par tremper la motte et démêler les racines pouvant former un éventuel chignon racinaire. Allez-y toujours avec douceur, car le système racinaire de cette plante n’aime pas être brutalisé.
Creusez un trou d’au moins 3 fois le volume de la motte et rebouchez avec la terre amendée. Le haut de la motte doit toujours affleurer le niveau final du sol. Tassez ensuite le substrat au pied et arrosez abondamment.
La plantation se termine toujours par l’apport d’un paillis organique de type copeaux de bois et broyages de branches.
Il est aussi possible de le planter en gros pots, car il n’apprécie pas les transplantations. Le but est donc de lui donner un volume de terre suffisant pour qu’il puisse y vivre de nombreuses années. Choisissez un pot en terre cuite ou en résine (surtout pas en plastique en raison du manque d’inertie) d’au moins 50 cm de diamètre. Utilisez alors un mélange de terre végétale et de terre de bruyère.
3. L’ENTRETIEN
3.1. L’arrosage
L’Edgeworthia est une plante qui n’aime pas l’excès d’eau et déteste aussi la sécheresse. Suivez scrupuleusement l’arrosage après la plantation pour y apporter les justes besoins. Lorsqu’il est en feuilles, il est très facile de se rendre compte d’un manque d’eau. Ses feuilles se ramollissent alors et pendent vers le sol. C’est le moment d’intervenir avec un bon apport.
Préférez l’eau de pluie qui n’est pas calcaire.
3.2. La fertilisation
On le rencontre naturellement dans des sols riches en matières organiques, il est de ce fait important de reproduire ces conditions pour qu’il donne le meilleur de lui-même. Complétez chaque année d’un apport de compost à l’automne épandu tout autour de la touffe. Rapportez également une bonne couche de paillis qui enrichira lui aussi le sol au fur et à mesure qu’il se décompose.
En pot, une fertilisation en mars et en septembre avec un engrais complet organique est recommandée.
3.3. La taille
La taille n’est pas conseillée sur cet arbuste. Son port naturel suffit à ce qu’il soit agréable à regarder sans avoir besoin d’être guidé. Le bois mort peut par contre être retiré.
En cas d’obligation de transplantation, il est par contre obligatoire de rabattre l’intégralité de la touffe d’un tiers afin d’équilibrer le volume de tiges et de racines. Sans cette intervention, vous augmentez considérablement les chances de non reprise.
3.4. Les maladies et ravageurs
Aucune maladie et aucun ravageur ne s’attaque à l’Edgeworthia dans nos jardins.
Les problèmes que vous pourriez rencontrer seront principalement dus à une mauvaise exposition ou un problème de sol :
Les feuilles jaunissent
Sans doute une mauvaise assimilation du fer en sol trop basique. Ajoutez de la terre de bruyère pour l’acidifier et apportez-lui un apport de sang desséché en sortie d’hiver
Un excès d’eau peut aussi être à l’origine de ce symptôme, drainez et allégez le sol ou bien stoppez tout arrosage si c’est le cas.
Les feuilles brunissent ou tombent
C’est ici une exposition trop chaude, un soleil trop fort et sans doute un sol trop sec ou mal paillé qui en sont la cause.
4. LES BONNES ASSOCIATIONS
Le Buisson à papier n’apprécie que peu la concurrence foliaire pouvant nuire à son développement. Il est donc important de ne pas le planter trop serré ou en compagnie d’arbustes trop envahissants. La concurrence racinaire de grands arbres n’est en revanche pas un souci. Un paillage important est par contre indispensable pour garder au mieux la fraîcheur du sol.
Il peut, dans ces conditions être accompagné de plantes aux besoins similaires comme les Camélias, Hydrangea, Pieris, Sarcococca, Leucothoe, Daphné ou autres Erica.
Coté vivaces, les couvres-sol plantées à son pied s’avèrent être une excellente idée pour le mettre en valeur. Utilisez des plantes persistantes comme les Heuchères, Pervenches, Pachysandres ou autres Bugles rampantes. Variez les couleurs de feuillages pour apporter du contraste, mais aussi les formes pour renforcer l’esprit de densité ou de légèreté. Dans cette recherche, les graminées peuvent aussi rejoindre la ronde comme les Hakonechloa ou les Carex.